hajm-e-sabz (l'espace vert)
L'EXIL Le lune flotte au-dessus du village Tandis que dormant les gens. Étendu sur le toit à la belle étoile Je me grise des arômes qu'exhale la terre crue de l'exil La lampe vacille dans le jardin du voisin. Ma lampe, défaillante, demeure éteinte. La lune cisèle les contours de l'assiette où veillent les concombres, Elle découpe le galbe de la cruche de terre. Les crapauds chantent et parfois Une chouette des bois. La montagne est toute proche: derrière les érables, derrière les sorbiers. Visible aussi le désert argenté. On n'y voit pas les pierres, on n'y voit pas les épines sauvages. Au loin chancellent des ombres comme la solitude des eaux, Comme le chant de Dieu. Ιl doit être minuit. On dirait que la Grande Ourse est à deux pas du toit. Le ciel n'est pas bleu. Pourtant le jour l'a été. Puissé-je me souvenir d'aller demain au jardin de Hassan Et d'acheter des prunes et des abricots! Puissé-je me souvenir d'aller demain au bord de l'étang et d'y dessiner les chèvres, D'y dessiner les roseaux et leurs ombres sur l'eau! Puissé-je me souvenir de sauver aussitôt tout papillon Qui tomberait par mégarde dans l'eau! Puissé-je me souvenir de ne rien faire qui pourrait troubler la loi de la terre! Puissé-je me souvenir de laver demain mes linges dans le ruisseau! Puissé-je me souvenir que je suis seul! Au-dessus de la solitude flotte la lune. |